L'arbre et Raoul Dufy

 

En 2008 le musée des Beaux-Arts de Nice a décidé de rapprocher dynamiquement les beaux-arts de la vie quotidienne et d'inviter notamment l'art contemporain à revisiter les œuvres de sa collection.

C'est dans le cadre de la programmation : « Regards contemporains sur la collection » et des Journées du Patrimoine, elle traite du thème de la nature et de l’arbre, révélant la modernité de l’œuvre de Raoul Dufy et de on époque.

 
 

L'arbre et Raoul Dufy

Regards contemporains sur la collection, parcours “L’arbre et Raoul Dufy”, Musée des Beaux-Arts de Nice - 19 au 20 septembre 2009

A L'occasion des journées du patrimoine, Véronique Bigo achève quatre saisons de travail autour de la collection du musée des Beaux-Arts par son approche originale des œuvres de Raoul Dufy dont le musée détient une importante collection. Elle clôt son parcours en nous ramenant à l'objet emprunté au paysage, partageant sa vision de la nature et de la couleur avec Raoul Dufy.

 

La forme interrogative

Perturbantes, dérangeantes, les grandes peintures de racines de Véronique Bigo nous emmènent dans un univers où la nature, loin d'être le délassement de l'homme urbain, révèle, comme dans l'œuvre de David Caspar Friedrich, les tourments de la vie. […]

Ces images de racines qui s'exhibent hors de la terre, comme on peut en voir au Viet Nam, à l'Ile Maurice ou au Costa Rica, reposent la question récurrente de la puissance des formes sur notre imaginaire.

L'inquiétude du mou

Les racines de Véronique Bigo nous surprennent par l'étrangeté de leurs tiges, au développement incertain et anémié et qu'on imagine nourries par une mousson trop chaude. La croissance semble avoir ici laissé place à des excroissances paresseuses. Accrochées comme des grappes de morceaux d'intestins, figées par un soleil qui n'aurait jamais dû les réchauffer, elles nous dérangent par leur mollesse cartonneuse. […]

Sa représentation crue de la forme molle, presque informe par son étrangeté, dégage une violence qui percute directement nos références sensibles les plus primitives. Le mou qui n'est pas le doux, dérange notre perception du sensible, surtout quand l'artiste met en scène l'improbabilité du réel.

L'ouverture par la couleur

Cette force jaillit dans les traits de couleurs, verts, bleus ou noirs qui débordent de l'œuvre pour se confondre avec les cimaises qu'elle a elle-même conçues pour porter ses tableaux. Placées devant des fenêtres, elles réduisent la nature environnante à une unique vibration chromatique qu'elle perturbe de graffitis, signes de l'inscription de ses émotions dans l'environnement. Comme Raoul Dufy, elle dissocie ainsi le dessin et la couleur. Mais alors que chez le premier la couleur dépasse le trait du dessin pour essayer de saisir le mouvement, elle les sépare complétement pour laisser à chaque spectateur la possibilité de leur accorder sa propre vibration sensible. […]

 

Brice d'Antras critique d'art et de design, Paris, 2008

Textes extraits du flyer « Regards contemporain sur la collection 19-20 septembre 2009 », Musée des Beaux-Arts de Nice.

Crédit photo : JC LETT